Heinkel He 111 (WNr. 1577 - code probable 1G+GT)
La Mézière - "Glérois"
(contributeurs : Daniel Dahiot, Claude Archambault, Vincent Sévellec, Guy Castel, Pierre Mahé)
Heinkel He 111.
Photo © collection Benoît Paquet - ABSA 39-45
Equipage (9./KG 27)
- (FF*) Oberleutnant Hans STÖßEL, né le 19/01/1916 à Offenbach.
Gruft 9 Grab 35, Mont-de-Huisnes.
- (BO*) Unteroffizier Ernest-Albin URBICH, né le 03/08/1914 à Kirchheim
Gruft 9 Grab 78, Mont-de-Huisnes.
- (BF*) Unteroffizier John Konrad (Jonny) MÜLLER, né le 20/03/1911 à Londres.
Gruft 9 Grab 46, Mont-de-Huisnes.
- (BM*) UnteroffizierSiegfried WIECHERS, né le 30.10.1915 à Vethen.
Gruft 9 Grab 79, Mont-de-Huisnes.
* FF : Flugzeugführer (Pilote) - BO ou B = Beobachter (Observateur) - BF = Bordfunker (Radio) - BM = Bordmechaniker (Mécanicien) - BS = Bordschütze (mitrailleur)
L'HISTOIRE
Un Heinkel He 111 s'écrase après avoir décollé de Rennes - Saint-Jacques au lot du Glérois, à la Mézière, à 500 m de la route Rennes - Saint-Malo.
On ne sait pas grand chose des circonstances du crash mais l'on dispose de quelques photos transmises exceptionnellement par Walter Waiss, auteur de la série de cinq livres sur la KG 27 ("Boelcke Archiv Band I à V, Chronik KG 27 Boelcke"). Ces photos sont interdites à la reproduction.
A la suite de ces photos, des témoignages de civils bretons relatifs à ce crash
Joseph Delabarre, de Biardel, près de la carcasse de l’avion Allemand, le 1er septembre 1940.
Photo © collection Walter Waiss - Reproduction interdite
Les débris éparpillés du Heinkel He 111 tombé le 1er septembre 1940 à la Mézière.
Photo © collection Walter Waiss - Reproduction interdite
Le moteur du Heinkel He 111 après le crash.
Photo © collection Walter Waiss - Reproduction interdite
Inspection des débris du Heinkel He 111 par les soldats Allemands en présence de J. Delabarre.
Photo © collection Walter Waiss - Reproduction interdite
TEMOIGNAGES
Un extrait du livre de Guy Castel et Pierre Mahé " Résistance et aviateurs américains, Nord de l’Ille-et-Vilaine 1944 " nous révèle les informations suivantes :
[...] " Les Allemands sont à Saint-Jacques. L’aérodrome est occupé le 22 juin (1940) par des Messerschmitt Bf 109 E de la JG 53 « Pik As ». Le 2 août 1940, les Heinkel He 111 du troisième groupe du KG 27 « Boelcke » les rejoignent. Les travaux d’aménagement et d’édification de bâtiments des Français sont poursuivis, ainsi que les hangars commencés. Les Messerschmitt Bf 109 restent peu de temps et laissent les bombardiers He 111 à la mi-septembre. Ceux-ci, présents à Saint-Jacques depuis le 2 août, sont un peu plus d’une dizaine (en fait ils devaient être plus de 20). M. Jobbé Duval observe que les jours de raids sur l’Angleterre, d’autres Heinkel viennent à Rennes rejoindre ceux qui s’y trouvent. Ce qui lui permet à chaque fois de prévenir Londres. Le 8 août 1940 commence l’attaque de l’Angleterre par l’aviation allemande, « le Blitz ». Le 22 mars 1941, le 3e groupe du KG 27 Boelcke quitte Saint-Jacques pour Orléans-Bricy.
Un avion allemand tombe à Biardel.
Basé à Saint-Jacques-des-Lande depuis août, le Heinkel He 111 WNr. 1577 (code 1G+GT) décolle et survole le nord de Rennes. L’appareil faisait partie de la 9./KG 27 (III. Gruppe), commandée par le Major Manfred Speck von Sternberg.
La chute d’un avion à Biardel, n’a gardé de traces que dans la mémoire populaire. Le quotidien Ouest-Éclair ayant reparu le 4 juillet 1940 était frappé de censure.
Le champ de l’avion en 2004 avec au fond l’église. Aujourd’hui ce lieu est le lot de Glérois.
Photo collection Guy Castel.
En cette soirée estivale, à la tombée de la nuit (vers 20h), Pierre Biet, habitant sa petite ferme du bourg, route de Gévezé, a bien vu l’avion survoler le nord du bourg « avant qu’il ne fasse une courbe » et Roger Delabarre, de Biardel, se souvient « qu’il fut probablement atteint par un chasseur allié au-dessus de Tinténiac ». L’avion, qui avait pour mission d’aller bombarder l’Angleterre, évita le centre-bourg, grâce à la dextérité du pilote qui fit tout pour l’éviter, avant de s’écraser à Biardel (emplacement du collège actuel). Il évita ainsi un bilan humain plus lourd en cette fin d’été, et alla s’écraser, en feu, près de la ferme des Morin et des Desevedavy, à Biardel, où les jeunes filles Marie (épouse Lebreton) et Emilie (épouse Trotoux) ont témoigné : « l’avion est tombé la veille de l’enterrement de Louis Daumoin de Montgerval, tué accidentellement par une voiture allemande. Il revenait de chez le père Simon faire sa livraison de sacs de toile raccommodés. Le pauvre homme vivait de peu et était rétribué 5 sous le sac reprisé ». Le pauvre homme disait « j’étais trop jeune pour avoir été incorporé à la guerre de 1870 et trop vieux pour avoir participé à la guerre de 14-18, j’ai ainsi échappé aux fronts ».
Et pourtant tout cela pour finir écrasé par un véhicule ennemi en 1940 ! Il habitait Montgerval à la Bourdonnais, né à Pacé le 28 avril 1862, fils de François Julien et de Julienne Gourdet ; décédé à La Mézière le 30 août 1940. L’enterrement eut lieu le lundi 2 septembre en matinée en présence d’une assistance modeste dont nos deux Macériennes Emilie et Marie. Le corbillard à cheval, mené par Fourel, le marchand de grain, de la route de Gévezé, près de chez Biet, est passé à proximité du champ dit (depuis) « le champ de l’avion » comme l’a témoigné Gérard Bazin. Les deux jeunes filles ont pu voir les débris de l’avion en partie calciné dans le bas de la parcelle de blé, brûlée elle aussi, nommée la Grande Longueraie. Un jeune pommier a été écimé dans le bas du champ et une aile de l’appareil s’est trouvée dans une parcelle appartenant à la famille Lorand (terrain d'honneur de football actuel) et les roues dans une parcelle de betteraves dite le Chantillard, non loin de la grande route (RN137). « Tout était brûlé et éclaté ».
Pierre Biet était dans son jardin en 2001, comme quand il vit l’avion Allemand amorcer une courbe.
Photo collection Guy Castel.
En revenant de l’enterrement vers midi, le lundi 2 septembre, la mère de Marie Lebreton a raconté à sa fille les événements de la matinée. Deux Allemands se sont présentés à la ferme de Biardel pour réclamer une omelette. La fermière a obtempéré. Un 3e Allemand arrivé plus tard n’a fait que pleurer. Il s’est approché de l’âtre et a fait voir à la mère Lebreton un morceau de charbon noir et a indiqué du doigt « comme camarades à moi ». Dans l’après-midi, la jeune Marie a voulu visiter les lieux. Elle fut interpellée, comme son père le matin même, en allant à la batterie chez le père Huchet à la Motte (route de Gévezé) en ces termes par les Allemands stationnés ordinairement à Gévezé et à Melesse, « Kommandantur, prenez route ». Deux souvenirs ont encore marqué la jeune fille. Le premier était amusant ; elle avait remarqué un jeune homme, gars des Loges (château), Ernault de Moulins, âgé d’une dizaine d’années, venu avec son vélo et sa remorque récupérer des débris de ferrailles (il m’avouera plus tard, dans les années 2000, avoir utilisé un morceau de la carlingue comme rebord à une ruche dans le parc du château). Le second, plus dramatique, remonte aux jours qui ont suivi la chute de l’avion. Alors que la quasi-totalité des débris de l’appareil avaient été enlevés dans les 72 heures, propagande oblige, (nous étions le long d’une Nationale !). La jeune Marie découvre « sur un talus à José Lorand, je peux encore dire l’emplacement, un pied Allemand dans sa botte. Qu’auriez-vous fait à ma place ? Moi je n’ai rien fait, je n’ai rien pu faire, mais j’ai beaucoup pleuré ? Ce qui m’a fait le plus mal au coeur, c’est de penser que le tué était Allemand, cela aurait pu être mon mari. Mariée depuis 1938, mon mari était à cette époque lui aussi à la guerre et prisonnier. Il aurait pu être à sa place. Quand les Allemands étaient tous là, ça ne m’avait pas fait pareil ! ».
Au début des années 2000, Marie Lebreton chez elle à Biardel.
Photo collection Guy Castel.
La date est confirmée par les registres d’inhumations des soldats allemands en date du 1er septembre 1940. Les deux Macériennes Marie Lebreton, née Morin, et Emilie Trotoux, née Desevedavy, avaient bien le souvenir d’avoir vu quatre à cinq cercueils en bois le lundi 2 septembre partir dans des véhicules en direction de Rennes. Les Allemands avaient réquisitionné, pour l’occasion, des ouvriers travaillant sur la route nationale N137, « Ils ont posé les fils du téléphone sous terre ».
Les recherches de Jacky Glaise nous ont permis d’apprendre que les quatre cadavres des aviateurs allemands, après avoir été enterrés à Rennes, ont été inhumés à l’ossuaire militaire du Mont de Huisne (Huisne-sur-Mer, dans la Manche) à 10 km au nord-est de Pontorson, dans la baie du Mont-Saint-Michel. [...]
[...] Au Mont de Huisne, pour l’Ille-et-Vilaine, la liste comporte 1 405 noms dont 250 décédés avant le 4 août 1944. [...]
Casque de l’un des aviateurs Allemands conservé par la famille de Raymond et Marie-Rose Léone qui habitaient rue de la Flume.
Photo collection Guy Castel.
[...] Guy Castel a rencontré en mai 2007 Jean Hardy, Emilie Trotoux et Marie Lebreton qui, tous de façon unanime, ont identifié Joseph Delabarre, né en 1903, et exploitant la ferme voisine de Biardel, une ferme de dix hectares avec neuf vaches et un cheval. Ils ont déclaré : « Il est facile à reconnaître, il portait toujours sa casquette de travers ».
Son fils Roger a confirmé : « on dirait mon père avec sa casquette de travers ».
Au début des années 2000, Jean Hardy, chez lui à la Vollerie.
Photo collection Guy Castel.
Cet avion, abattu par la chasse Anglaise (ou victime d’une panne moteur), est un des 1ers avions allemands tombés en Ille-et-Vilaine depuis le début de l’Occupation en 1940. Les occupants ont fait place nette du champ dit « de l’avion » en un temps record. Il est situé sur le bord de la route à grande circulation RN 137 Rennes-Saint-Malo ! Marie Lebreton avait confié : « les Allemands avaient réquisitionné, pour l’occasion, des ouvriers travaillant sur la route nationale, occupés à poser des fils du téléphone sous terre ». [...]
ANNEXES
♦ Certificats de décès des 4 membres de l'équipage
- Hans Stößel : lieutenant, pilote, né le 19 janvier 1916 à Offenbach, numéro de plaque d’identité militaire : 62694-110. Inhumé tout d’abord au cimetière de l’Est dans la rangée n°6, tombe n°1, 2-E 6/1552 ; site d’inhumation actuel au cimetière allemand du Mont de Huisne, caveau no 9, chambre mortuaire no 35.
Certificat de décès de Hans Stößel (n°G-A 102/1468).
Source document Fold3 "Germany, Military Killed in Action 1939-1948" - origine Bundearchiv
- John Konrad (Jonny) Müller : sous officier, opérateur radio, né le 20 mars 1911 à Londres, numéro de plaque d’identité militaire : 62694-29. Inhumé tout d’abord au cimetière de l’Est dans la rangée n°7, tombe n°2, 2-E 5/1557, site d’inhumation actuel au Mont de Huisne, caveau n° 9, chambre mortuaire n° 46.
Certificat de décès de John Konrad (Jonny) Müller (n°G-A 629/0757).
Source document Fold3 "Germany, Military Killed in Action 1939-1948" - origine Bundearchiv
- Ernst-Albin Urbich : sous officier, observateur, né le 3 août 1914 à Kirchheim, numéro de plaque d’identité militaire : 71105-35. Inhumé tout d’abord au cimetière de l’Est, rangée n°6, tombe n°5, 2-E 6/1554, site d’inhumation actuel au Mont de Huisne, caveau n°9, chambre mortuaire n° 78.
Certificat de décès d'Ernst-Albin Urbich, identifié d’abord comme Ernst Urbig (n°G-A 259/0135).
Source document Fold3 "Germany, Military Killed in Action 1939-1948" - origine Bundearchiv
- Siegfried Wiechers : né le 30 octobre 1915 à Vethen, mécanicien de bord, numéro de plaque d’identité militaire : 67018/25. Inhumé tout d’abord au cimetière de l’Est dans la rangée n°7, tombe n° 5, 2-E 5/1553, site d’inhumation actuel au Mont de Huisne, caveau n°9, chambre mortuaire n°79.
Certificat de décès de Siegfried Wiechers (n°G-A 319/1724).
Source document Fold3 "Germany, Military Killed in Action 1939-1948" - origine Bundearchiv
Sources :
- Boelcke-Archiv. band II & Band III. Walter Waiss, Weißdornweg 20a, D-41468 Neuss.
Le premier livre de la série est manquant. Vous pouvez contacter Walter Waiss à walterwaiss@t-online.de
- Gräbernachweis des Volksbundes Deutsche Kriegsgräberfürsorge e.V.
- " Résistance et aviateurs américains, Nord de l’Ille-et-Vilaine 1944 " - Guy Castel et Pierre Mahé, Collection ABSA 39-45 - 2024, ISBN 978-2-9525482-3-6.
Vous pouvez contacter Benoit Paquet (ABSA 39-45) à b.paquet@orange.fr
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