Republic P-47D-25-RE Thunderbolt "Blackie"
s/n 42-26704 (code B8-?)
Derval, près de la gare (44)
(contributeurs : Vincent Bourgine, Pierre Mahé, Jaap Vermeer, "TimeFlies")

Un Republic P-47D-25-RE - Photo San Diego Air and Space Museum Archive

Emblème du 379th FS - Source USAF (domaine public)
Pilote (362nd FG - 379th FS)
Photo collection Jaap Vermeer
1st Lieutenant Robert George BARNES (matricule O-745266 - DFC, Air Medal avec 5 feuilles de chêne), tué.
Né le 2 juin 1920 à Leechburg, Armstrong County, Pennsylvanie.
Il vécut ensuite à New Kensington, Westmoreland County, Pennsylvanie (USA).
Fils de M. et Mme Dale Barnes.
S'enrôla le 30 mars 1942 à Pittsburgh, Pennsylvanie.
Enterré au Cimetière Américain de Saint-James, parcelle I, rangée 11, tombe 1.
L'HISTOIRE
Un P-47D Thunderbolt s'écrase au sol à Derval le 6 juillet 1944.
Ce 6 juillet 1944, le 1st Lt BARNES décolle de la base RAF Headcorn, de type Advanced Landing Ground (ALG) située au Nord-Est d'Headcorn dans le Kent, en Angleterre. Créée en 1943, cette base était un prototype temporaire des futures ALG que les alliés prévoyaient d'ouvrir en France après le débarquement. Elle fut fermée en septembre 1944. La mission était une mission de reconnaissance armée et de bombardement en piqué.

La base RAF Headcorn le 11 mai 1944 - Photo United Kingdom Government (domaine public)
Barnes volait avec le 1st Lt John Rollin SHUMWAY qui raconte la chute de BARNES dans son rapport de perte (voir annexes MACR 6670) :
Le plafond était à 12 000 pieds (3600 mètres) et la visibilité était bonne.
"Le 6 juillet 1944, le lieutenant Barnes, volant en position Yellow 3 dans mon escadrille, signala la présence d'un camion dans ces 5 heures. Incapable de le localiser, je donnai l'ordre au lieutenant Barnes de prendre la tête. Il dévia vers la droite et se plongea sur le chemine à environ 350 mètres. Son attaque était d'environ 20° en piqué. Je le vis tirer une rafale alors qu'il approchait de la cime des arbres. Alors qu'il continuait de tirer, son avion sembla se désintégrer, brûlant à ce moment-là, et il explosa presque aussitôt à une centaine de mètres des arbres. J'ai survolé le paysage et n'ai pu voir qu'un petit incendie et quelques débris éparpillés."
Dans son rapport, le 1st Lt SHUMWAY esquissa un dessin pour montrer l'endroit où il vit BARNES pour la dernière fois.

Un courrier envoyé le 13 août 1951 par Madame Marie-Anne Gautier, de Derval, à la mère du 1st Lt Barnes apporte des précisions sur la chute de l'avion.
"Madame,
Le Maire me communique la demande de renseignements que vous avez adressée au consulat français, au sujet de votre fils.
Mon père et moi étions au nombre des personnes qui ont relevé son corps quelques instants après l'accident. Je comprends que vous soyez en quête de détails, et suis fort étonnée qu'après tant d'années vous n'ayez pu en avoir plus tôt. Aussi je me fais un devoir de vous répondre rapidement pour vous dire ce que je sais de la fin tragique de votre fils, dont je me rappelais d'ailleurs fort bien le nom.
Par cet après-midi de juillet, nous étions un groupe d'hommes et de femmes, membres des équipes d'urgence de la Croix Rouge, en exercice d'alerte. Notre petite localité, très calme, n'a subi aucun bombardement ni dommages de guerre ; nous voyions seulement passer les escadrilles qui se dirigeaient sur les grands centres voisins et nous ne pensions guère que nos services allaient être utilisés presque aussitôt.
Le bruit d'avions survolant Derval assez bas, attira d'abord notre attention ; nous regardions un appareil qui tout, à coup piqua sur la gare, une minuscule gare où ne passent que trois ou quatre trains par semaine. Erreur d' objectif ? Peut-être. Nous entendions immédiatement le bruit d'une bombe éclatée à quelque distance, puis un mitraillage. Quelques instants après, la docteur chez qui nous étions, arrivant de visiter un malade, nous apprenait que sa voiture, arrêtée tout près de la voie ferrée, avait, été l'objet de ce mitraillage. Votre fils croyait sans doute attaquer une voiture allemande et il piqua droit dessus comme je vous l'ai dit, mais, descendant trop bas, il accrocha des branches d'arbres et des fils téléphoniques et ne put redresser. Il rasa alors, sans aucun accident d'ailleurs, les quelques maisons voisines de la gare et s'écrasa 200 mètres plus loin, dans un champ ; l'explosion fut entendu fort loin. C'est alors que nous nous sommes dirigés sur le lieu de l'accident ; quelques messieurs au nombre desquels se trouvait mon père, recueillirent les restes de votre pauvre garçon et les transportèrent à la mairie de Derval. Un petit paquet fut trouvé sur lui, et contenant sans doute ses papiers, fut aussitôt remis aux autorités. Nous ne savions pas alors de qui il s'agissait mais je me souviens avoir vu une main de votre fils, et je me rendis compte qu' il s'agissait d'un jeune homme. Nous étions tous atterrés ; je fus d'autant plus frappée que l'un de mes cousins, également aviateur, avait disparu quelques mois plus tôt dans un accident semblable.
Une cérémonie religieuse fut célébrée le lendemain, à l'église catholique, puis le corps fut inhumé au cimetière [de Derval]. De nombreuses personnes assistèrent aux obsèques ; une collecte de fleurs avait été faite dans les familles du bourg, et d'ailleurs sa tombe fut souvent fleurie par la suite.
Quelques jours plus tard un officier américain, venu à Derval pour obtenir des renseignements sans doute, nous parla de l'accident mais préféra ne pas se rendre sur les lieux ; il paraissait fort attristé. C'est de lui sans doute que vous tenez les quelques renseignements que vous possédez.
Voici, Madame, le peu que je puisse vous dire des derniers moments de votre fils. Il est tombé en faisant son devoir, et vous ne pouvez qu'être fière de lui. Quant à nous, nous avons agi comme nous le devions envers un soldat allié, il n'y a là aucun mérite spécial, croyez-le. En vous assurant de ma sympathie, je vous prie de croire, Madame à mon respect.
Marie-Anne Gautier
Derval le 13 août 1951".
Un extrait du document "Derval - Vie Rurale au XXème siècle - 1900 - 1950" (voir en annexes) nous indique également :
Le 6 juillet 44, Derval est témoin d'un grave accident aérien dont la victime est un Américain. Vers les 15 heures, un groupe de trois avions de combat "Thunderbolt" venant de Rennes arrive dans le ciel à hauteur de Derval. Quand tout à coup l'un deux plonge à partir du Boschet, étêtant sur son passage les arbres bordant la route qui conduit à la gare et s'écrase dans un pré distant d'une centaine de mètres de celle-ci.
Que s'est-il passé ? Selon la version retenue à cette époque, il semble que cet aviateur, le lieutenant Robert G. Barnes, en voulant mitrailler la voiture du docteur Capel qui passait précisément à cet endroit et qu'il avait sans doute prise pour une voiture ennemie, aurait alors perdu le contrôle de son appareil en accrochant la cime des arbres, ce qui aurait provoqué l'accident et sa mort.
Il existe une seconde version qui n'a pas été prise au sérieux, sans doute parce qu'elle venait d'un enfant d'une dizaine d'années et que peut-être celle-ci "arrangeait" moins !
" J'étais à garder mes vaches sur la butte de la Grée, entre le moulin "du Thu" et le bois du Boschet lorsque je vis arriver sur moi un groupe d'avions. De l'un d'entre eux se dégageait une épaisse fumée, puis il perdit de l'altitude. Quelques minutes après, j'entendais un énorme bruit et compris qu'il venait de s'écraser". Si on prend en compte cette version, il est permis de penser que cet avion ait pu avoir un ennui de moteur ou qu'il ait été touché par la D.C.A. de Rennes (ou d'ailleurs).
En constatant la chute de l'un d'entre eux, les autres aviateurs qui se dirigeaient vers le sud firent demi-tour et lachèrent quelques bombes dans la région. Peut-être pour saluer leur camarade ? On a prétendu qu'une bombe serait tombée derrière le calvaire du Pas d'Hin sans que l'endroit ait pu être véritablement matérialisé.
Dans les minutes qui suivirent cet accident, plusieurs personnes se rendirent sur les lieux. Les unes emportaient une pièce de métal d'avion, un peu comme on emporte une relique. D'autres s'activaient à récupérer les restes du malheureux pilote. Sa dépouille mortelle fut conduite à la morgue de l'Hospice. Le lendemain avait lieu la sépulture dans le cimetière de Derval. On dit qu'un groupe d'environ une centaine d'hommes et quelques femmes accompagnaient le cercueil de cet aviateur allié et que deux Feldgendarmes allemands, en side-car, se tenaient le long du cortège funèbre et qu'ils lui rendirent les honneurs militaires.
Plus tard, après la libération, une délégation d'autorités locales vint se recueillir sur sa tombe. Une photo immortalisant cette manifestation est demeurée introuvable. Après la guerre, en 1945, le cercueil de Robert G. Barnes sera exhumé et partira vers son pays natal : les Etats-unis [Barnes a en fait été conduit au cimetière de St James dans la Manche].
IN MEMORIAM
• La tombe du 1st Lt Barnes en juillet 1944 à Derval
Nous cherchons à identifier les personnes autour de la tombe. Si vous reconnaissez quelqu'un, merci de nous contacter : b.paquet@orange.fr

La tombe du 1st Lt Barnes à Derval en 1944.
Photo Pierre Mahé
• La tombe du 1st Lt Barnes aujourd'hui au Cimetière Militaire Américain de Saint-James (50)

La tombe du 1st Lt Barnes aujourd'hui à Saint-James (50).
Photo Vincent Bourgine
• Memorial à Headcorn, dans le Kent en Angleterre
Cette plaque, rappelant l'existence de la base RAF, rend hommage aux aviateurs du 362nd FG ayant décollé de la base RAF Headcorn entre avril et juillet 1944 et qui furent tués.
Le 1st Lt Barnes, du 379th FS (flèche) y est cité.


Plaque memorial à Headcorn, dans le Kent en Angleterre.
Photo "TimeFlies" via le site Findagrave
DANS LA PRESSE
• Articles de journaux parus vraisemblablement dans un journal local après la disparition du 1st Lt Barnes
Cet article évoque une lettre reçue par les parents de Barnes, envoyée par le Major William J. Flavin. nous informe que le 1st Lt Barnes a été cité pour l'Air Medal avec trois feuilles de chênes.
[au final Barnes eut 5 feuilles de chêne].
On apprend également que Barnes fut diplômé du Lincoln Aeronautical Institute en 1942, et qu'il fut membre des équipes de softball et basket-ball de cet institut.


Source document : "Jaap Vermeer" via le site Findagrave
ANNEXES
• MACR 6670 (Missing Air Crew Report - Rapport de perte) du 1st Lt John Rollin SHUMWAY
(source Archives Nationales américaines).











• Derval - Vie Rurale au XXème siècle - 1900 - 1950 (pages 157 et 158)



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